L'Indonésie rouvre aujourd’hui la destination de Bali. Dès le 1er novembre, la Thaïlande permettra aux personnes vaccinées de se prélasser sur ses plages. Singapour, Malaisie, Vietnam, Inde, Sri Lanka veulent tous revenir peu à peu au "monde d’avant".
La directrice du centre Asie de l’Institut français des relations internationales met en avant les nuances de cette tendance de fond. Chaque pays a ses raisons de rouvrir, qu’elles soient sanitaires ou économiques. A Singapour, où le taux de vaccination atteint les 80%, "il ne s’agit pas nécessairement de touristes", indique Françoise Nicolas. "Ce qui les intéresse aussi, c’est de faire revenir le monde du business, qui était tenu à l’écart jusque-là."
"Dans d’autres pays, comme l’Indonésie, ce n’est pas l’amélioration de la situation sanitaire qui explique cette réouverture", contrebalance la chercheuse. "Le taux de vaccination est très faible, il est inférieur à 30%. Là, la volonté est clairement de relancer l’industrie touristique."
Dépendance au tourisme: ça dépend
Mais attention, il ne faut pas voir dans cette tendance est-asiatique une stricte question de survie. En effet, le tourisme n’est pas nécessairement la seule source des revenus nationaux. "Dans le cas de l’Indonésie, cette industrie pèse relativement peu", précise Françoise Nicolas. "Ici encore, tout dépend de la zone dont vous parlez. Dans le cas de Bali, le tourisme pèse très lourd, mais dans l’ensemble de l’économie indonésienne, il ne pèse pas très lourd", développe-t-elle.
De manière générale, les pays ont tous opté pour un accueil de visiteurs prudent. Progressivité et sélectivité en sont les maîtres-mots. "Les pays se rouvrent à certains pays, dans lesquels le taux de vaccination est élevé, donc en gros les pays européens", explique la chercheuse.
Impact des visites en provenance de Chine
Françoise Nicolas insiste par ailleurs sur le poids certain de la Chine sur les économies des pays du sud asiatique. Or, l’Empire du Milieu bloque toujours les mouvements de population.
"Dans le cas de la Chine, il y a une posture quasi-idéologique. Il y a des craintes qu’il y ait à nouveau une flambée de l’épidémie", explique-t-elle. "Le taux de vaccination est élevé, certes, mais l’efficacité du vaccin a l’air douteuse. Les Chinois eux-mêmes ne sont pas autorisés à sortir de leur territoire", développe-t-elle.
Cette politique restrictive a un impact certain sur le secteur du tourisme. "En réalité, les Européens représentent une toute petite partie des touristes qui arrivent en Asie du Sud-Est", décrit la docteure en économie internationale. "Et ce qui serait vraiment crucial, ce serait que les touristes chinois reviennent, parce que ce sont eux qui constituent l’essentiel des touristes qui entrent dans ces pays. Et ce sont eux qui dépensent le plus."
L'impact du retour progressif des personnes de l'Ouest n'est donc qu'un facteur parmi d'autres d'une reprise économique. "Les touristes européens sont en général pointés du doigt pour être assez peu pourvoyeurs de devises, parce qu’ils ne dépensent pas assez", glisse du reste Françoise Nicolas.
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Propos recueillis par Romaine Morard
Traitement web: Antoine Michel
L'Empire du milieu au centre
De manière générale, l’arrêt brutal de la Chine a eu un impact considérable sur l’économie asiatique et pas uniquement sur le secteur du tourisme, rappelle Françoise Nicolas. Les pénuries de produits et composants et une demande chinoise en rade, auxquelles s’est ajoutée la pandémie, ont ébranlé la croissance est-asiatique en 2020, qui fut négative.
Les prévisions pour 2021 sont encourageantes, avec le retour d’une croissance positive, même si elle n’atteindra pas le niveau d’avant-crise: "4% aux Philippines et en Malaisie. Environ 2,5% pour le Vietnam. C’est beaucoup plus faible pour la Thaïlande, on sera à moins de 1%", énumère l'économiste.